© Yannick Ribrioux
Château du Bas-Guéret
  Le " guéret " est une parcelle de terre laissée en jachère et qu'on laboure pour la première fois afin d'être ensemencée dans l'année. Ce toponyme (biblio) laisse penser que les nombreux défrichages des XIIe et XIIIe siècles ont permis l'installation de quelques habitations sur les hauteurs de Mareuil dans le secteur du Haut-Guéret et plus tard vers le Bas-Guéret, ce qui n'exclut pas une présence antérieure comme dans le hameau voisin de Bagneux occupé dès l'époque gallo-romaine.
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Au XVIe siècle, le Guéret est déjà un fief dont les seigneurs "rendent foi et hommage" au comte de St-Aignan. L'histoire du Guéret rejoint celle des villages voisins lorsque René Le Jart, écuyer, sieur de la Voulte à Pouillé fait l'acquisition de Bagneux puis de Guéret en 1598 et 1606. Ces fiefs resteront dans la famille Le Jart pendant plus d'un siècle : tout d'abord à Jean, curé de Mareuil et chanoine de la Collégiale de Saint-Aignan dans les années 1620 à 1640, puis à Charles, François et enfin Catherine, épouse de Georges de Thienne à la fin du XVIIe siècle.. .
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Au milieu du XVIIIe siècle, le Bas-Guéret est une petite ferme, probablement installée là depuis la fin du Moyen Âge, à l'écart du hameau du Haut-Guéret mais plus proche des points d'eau, ruisseau ou fontaine, utiles à l'homme et aux animaux.

.La "Haute Fontaine" est toujours visible sur la route d'Orbigny en contrebas du Bas-Guéret ; elle était encore fréquemment utilisée jusqu'à une période récente comme quelques autres parmi la douzaine de sources recensées à Mareuil.
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  Au début du XIXe siècle, le Bas-Guéret ne comprend qu'une maison d'un confort moyen et deux bâtiments agricoles appartenant à M. Delagrange, propriétaire à Châteauvieux. En 1856, Jacques Chesneau achète cette propriété et l'agrandit d'un grand bâtiment à 17 ouvertures pour s'y installer et gérer lui-même l'exploitation.
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En 1866, Louis-Félix Faure, industriel du Nord, fait l'acquisition de ce nouveau domaine. Ancien propriétaire du château de Mesnes, Louis-Félix Faure entreprend d'importants travaux pour installer sa fille Marie-Geneviève (1835-1900) et son gendre, Jules-Amédée Verley (1832-1881), à la tête d'une exploitation d'environ 45 hectares de vignes. Les principales modifications de la propriété commencent en 1877 par la construction d'un fournil puis, en 1879, celle du "château" pour finir en 1882 par la maison du régisseur à la place de l'ancien jardin. Dans le même temps, le bâtiment édifié par J. Chesneau est en partie démoli et l'installation d'une éolienne ajoute au confort de l'exploitation.
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Albert Cuvelier et son épouse Sophie Verley (1859-1927), fille de Jules-Amédée, deviennent propriétaires du Bas-Guéret en 1902 ; comme à l'époque de leurs parents et grands-parents, le château n'est qu'un lieu de villégiature jusqu'à la fin de la première guerre mondiale. François Cathelin, régisseur depuis 1872, se charge de l'entretien et de la gestion de l'exploitation. Cela n'empêche pas cette grande famille catholique d'être très présente dans la vie de la commune, au risque d'être mêlée aux nombreux conflits de la fin du XIXe siècle entre l'abbé Berrand, curé de Mareuil, et la toute nouvelle municipalité républicaine et anticléricale. La statue de ND. du Bas-Guéret, le parrainage des cloches et, plus tard, le don d'un vitrail ou la participation à la réfection du carrelage de l'église et autres dons témoignent de la fidélité de la famille à la paroisse.
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  Dès la fin de la première guerre mondiale, Jean Cuvelier (1885-1944), s'installe au Bas-Guéret devenu propriété de la Sté Cuvelier-Verley et Cie ; il gère l'exploitation avec l'aide du régisseur Léon Catelin, fils de François. A cette époque on ne dénombre pas moins de 14 domestiques hébergés au château ou dans la ferme, sans compter le personnel logé dans diverses maisons des Touches, du Haut-Guéret ou de la Herpinière.
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A l'entrée en guerre en 1939, les Cuvelier restent probablement l'une des familles les plus en vue à Mareuil. Pendant toute la période des conflits, l'activité au Bas Guéret, agrandi de quelques membres de la famille venus du Nord se réfugier en zone libre, est "presque normale". L'action des maquis, très nombreux dans le secteur, y est à peine perceptible. Pourtant, cette relative tranquillité est brutalement bouleversée par l'intervention de Lecoz et de ses hommes qui mettent le château à sac le 5 août 1944.
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Le 25 août 1944, l'Etat major FFI ordonne au lieutenant Guiet, commandant la 1ère Compagnie "Camille" du bataillon "Comte" de s'installer au Bas-Guéret pour surveiller la retraite des troupes allemandes dans la vallée du Cher. Jean et son frère Albert Cuvelier acceptent d'héberger les 200 hommes de cette armée officielle à condition qu'il n'y ait aucun combat sur Mareuil pouvant entraîner des représailles sur la population. L'engagement est respecté mais, le 31 août 1944, la vie de nombreuses familles bascule toutefois dans l'horreur. Lors d'un véritable massacre mené par des troupes allemandes en représailles à la disparition d'un de leurs soldats, on compte 7 victimes civiles abattues sauvagement et un FFI tué. Le château et quelques dépendances sont totalement détruits par le feu.
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En 1980, une croix est érigée au bord de la route d'Orbigny à la mémoire de Jean et Albert Cuvelier et de leurs ouvriers. Chaque année au 31 août, les Mareuillais n'oublient pas ces moments d'horreur et commémorent le souvenir de ces hommes morts en martyrs ou au service de la Nation pendant la guerre 39-45.

lien avec la collection de cartes postales du château de Bas-Guéret .

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